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Photo du rédacteurGilles Cosson

La faillite, l’inflation ou la guerre

Le nouvel économiste, 2012


Nos vieux pays européens entrent dans la mondialisation à reculons, pleins d’angoisse devant une révolution à laquelle rien ne les a préparés…


Là où la chute de Rome avait été précédée par l’avènement du christianisme, là où la révolution française était fille de l’Encyclopédie et le séisme bolchevique enfant spirituel du marxisme, la révolution mondialiste n’est si l’on peut dire « fille de personne ». Aucune philosophie structurante pour accueillir les débris de nos civilisations fatiguées ! Comme disait en son temps Gramsci : « le vieux monde ne veut pas mourir et le nouveau tarde à naître ». Le constat est inquiétant.


Faisons ensemble le tour des solutions envisageables :


  1. La faillite ne déplairait pas aux tenants actuels de l’extrême gauche. Elle éliminerait une bonne part des possédants tout en ruinant à coup sûr tous les épargnants. Je crois entendre le « bien fait ! » des thuriféraires de cette solution radicale. C’est la technique utilisée par l’URSS naissante dont elle n’a pu sortir qu’en affamant son peuple par des exportations de grain pour payer cash ses achats de machines. Mais c’est oublier qu’un pays qui a fait défaut ne s’en remet pas avant de très longues années. Et il faut être bien fou pour penser que le niveau de vie des plus pauvres en sortirait grandi. La faillite argentine quoi qu’on puisse en dire, n’est pas rassurante sur ce point. Encore ne s’agissait-il que d’un pays « moyen » dont les conséquences de la banqueroute ont pu être limitées… Le krach d’un grand pays aurait, lui, des conséquences incalculables.

  2. L’inflation : D’autres prônent la relance keynésienne à la Roosevelt : lancer de grands travaux d’intérêt général en empruntant davantage mais en mutualisant les dettes, ce que les Etats européens les plus sérieux contestent à bon droit. Rappelons à ce sujet quelques vérités utiles : Là où la France et l’Angleterre sortent ruinées de la guerre de 14, les U.S.A. de l’époque sont riches. En 1929, on estime le taux d’endettement fédéral à environ 25% du PIB. Rien à voir avec les 100 à 110% d’aujourd’hui ou les 85% (chiffre moyen) de l’Europe. De plus les “smoke stack industries”, disons les grands secteurs manufacturiers, sont encore intégralement présents sur le sol américain. Il est donc possible d’appuyer sur le levier relance par l’endettement au profit des usines locales là où l’Amérique actuelle a perdu des pans entiers de son outil industriel. Le fait est que la relance par la consommation (crédit à taux zéro etc.), profite largement au reste du monde sans doper beaucoup la croissance intérieure. Il y faudrait une politique beaucoup plus protectionniste permettant aux U.S.A. de remettre en route leurs chantiers navals, leurs usines sidérurgiques etc. Mais il est bien tard pour cela car ses créanciers ne l’entendraient pas de cette oreille et l’Amérique ne peut les ignorer sous peine de mesures de rétorsion ravageuses.

    Si l’on admet que la dévaluation unilatérale, euphorisante à court terme, est impossible au sein de la zone euro et qu’une croissance forte est sans doute écologiquement insupportable à l’échelle mondiale, le niveau de la dette actuelle ne saurait donc être stoppé et plus encore diminué (en % du PIB) que par un seul moyen: l’inflation. Osons un pronostic : Les Etats-Unis, Obama ou Romney, peu importe, vont continuer à faire tourner la planche à billets. La dette américaine ne se résorbera pas, tout au contraire. La consommation finira par reprendre, mais l’inflation va alors inévitablement démarrer compte tenu de l’énorme excès de liquidités. Devant ce phénomène, le cri unanime des sociaux démocrates européens sera de réclamer à leur tour la politique de relance qu’ils appellent de leurs vœux avec à la clef une inflation modérée (tout au moins au début). Face à une dévaluation significative du dollar, même l‘Allemagne finira par l’accepter. Cette inflation appauvrira bien sûr l’épargnant petit et moyen mais ce que l’on appelle poétiquement l’« euthanasie des rentiers » contribuera efficacement à diminuer la charge de la dette. C’est là que le déclin de l’Occident se précisera un peu plus (cf. « dans l’ombre de la décadence »).

  3. La guerre enfin a constitué, bien souvent dans l’histoire, l’exutoire à une situation sans issue. Et le poids d’un certain nombre de groupes d’influence américains au premier rang desquels le lobby militaro industriel peut légitimement faire peur : rien de tel qu’un bon conflit pour remettre tout le monde au travail et réveiller le civisme. C’était déjà la tentation de Julien l’Apostat à laquelle il a cédé en engageant la guerre contre la Perse (à propos, un certain G.W. Bush n’est-il pas parti flamberge au vent en Irak et en Afghanistan ?). Et le bruit de bottes que l’on entend du côté républicain, proche des lobbies en question, comme le remue ménage perceptible au Proche Orient, ne laissent pas d’inquiéter. Rien n’interdit de commencer par un bon « tour de chauffe » à l’occasion d’un conflit possible (probable ?) entre Israël et l’Iran en attendant les confrontations plus sérieuses qui ne sauraient manquer de se produire à terme, par exemple avec la Chine dont les stratèges de Washington observent avec appréhension l’ascension foudroyante. Et si, pour éviter le désastre, il fallait faire donner les armes atomiques, alors nous entrerions dans l’inconnu… Mais n’oublions pas que Fidel Castro, tel Stanley Kubrick dans son « docteur Folamour », incitait Nikita Kroutchev à utiliser l’arsenal nucléaire russe pour dénouer la crise de Cuba, ». L’humanité ne dédaigne pas de temps à autre une bonne secousse…


Tout cela n’est guère rassurant mais une chose est certaine : Seule l’avènement d’une philosophie ou à tout le moins d’une voie de recherche structurante, d’essence laïque ou religieuse, peu importe, peut indiquer aux peuples du monde le chemin d’espoir qui leur est si nécessaire. Et à cela, il est grand temps de penser.

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